Fernand LEGER

(1881 - 1955)

Pour l'artiste Fernand Léger, la vie moderne est synonyme d'existence compliquée. Au début du XXème siècle, la surabondance d'objets matériels et la vitesse des déplacements créent une nouvelle réalité condensée, un milieu dans lequel on découpe, assemble et usine le monde : " La machine marque le rythme de la psychologie humaine et bat la mesure de nos exaltations spirituelles" (Enrico Prampolini, The Aesthetic of the Machine and mechanical Introspection in Art, 1922). Léger fait éclater cette nouvelle réalité et la recompose sur la toile. Il introduit des rouges, jaunes et bleus vibrants cernés d'épaisses lignes noires qui découpent l'espace et dont les formes tubulaires et curvilignes, en faisant saillie, brisent le cube cubiste et jouent avec la profondeur de la surface picturale.
Soldat pendant la Grande Guerre de 1914 à 1917, Léger passe " quatre années sans couleur". Pourtant, cet environnement lui inspirera les machines et les figures robustes et hardies qui représente, selon Léger : " L'électricien en salopette, dieu moderne, roi-empereur, régnant sur nous et sur tout." (Léger, Art Institue of Chigago, 1953).
Après son congé de l'armée en 1917, Léger reprend sa vie civile avec une foi renouvelée dans l'art. Précis, coloré et astiqué, son travail de l'époque illustre une "esthétique de la machine" avec ses formes angulaires et pointues. En écho aux progrès techniques de son temps, il réalise de denses paysages de la vie urbaine, notamment Dans l'usine (1918) et La ville (étude) (1919-1920), dont il assemble soigneusement les éléments en jouant de l'abstrait et du littéral. Au milieu des années 1920, séduit par les possibilités du grand format, Léger entreprend une série de murales. A Paris en 1925, il participe avec le Corbusier à l'Exposition des Arts Décoratifs au pavillon de l'Esprit Nouveau où il créé des murales pour le hall d'entrée de " l'Ambassade française". A cette époque, Léger s'aventure également dans le monde rigide des néo-plasticiens avec quelques œuvres dont Composition murale (1924), qui se compose uniquement d'un cadre linéaire, d'une absence de représentation et d'une palette limitée.
Au cours des années 1930, Léger effectue plusieurs voyages aux Etats-Unis et expose dans différentes galeries New-Yorkaises. Il exécute également une série de murales pavillons d'exposition, tels le Palais de la Découverte à Paris en 1937 et le New York World's Fair en 1939. Dans sa pratique, il commence aussi à isoler "l'objet", le libérant contraintes de ses contextes, notamment dans son oeuvre de sa série Objets dans l'espace, où il juxtapose une image de la Mona Lisa avec un assortiment de clés. Léger poursuivra cette libération des formes dans ses toiles par des compositions organiques, flottantes et arrondies, combinant figure et technologie avec le monde naturel comme s'ils coulaient tous d'une même source. En 1940, il se rend de nouveau aux Etats-Unis où il demeure durant la 2ème Guerre mondiale. Il enseigne à l'Université de Yale et au Mills College en Californie, et il expose à New-York avec des contemporains tels Piet Mondrian, Max Ernst et Marc Chagall. De retour à Paris en 1945, il poursuit son travail et conçoit des décors pour le théâtre et le ballet ; il donne aussi des conférences à la Sorbonne et il expose en Europe. Sont travail de l'époque vibre de scènes spontanées de cirques, de musiciens et d'acrobates avec de larges bandes bleues, rouges et vertes qui traversent les tableaux. Il meurt en France, après une vie passée à représenter un monde aux prises avec la modernité.

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